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Ecologie du langage. Lettre aux buzzers, jargonneurs, pollueurs ! 1/4

Publié le par modimodi

 

 TQP  

Eco-buzz !

Si Raymond Devos et Pierre Dac nous ont amusés avec l'expression : "parler pour ne rien dire et ne rien dire pour parler", et "s'il vaut mieux la fermer avant de l'ouvrir", des questions restent à régler ! A qui parle-t-on et de quoi, et pourquoi ?

Il est des professions, pour informer, défendre et convaincre ! Ce sont celles de journaliste de la presse radiophonique ou télévisée, d'éditorialiste, de chroniqueur et d'animateur. Ils en ont fait un métier en vogue ! Car aujourd'hui, plus les mots sont vagues, plus ils sont en vogue.

Voguent donc les galères de tous ces mots prisonniers des buzzes de l'audimat. Ils font chemin dans l'opinion et imbibent les auditeurs et téléspectateurs, avachis dans leur fauteuil ! Les dictionnaires s'enrichissent régulièrement de tous ces néologismes venus de la rue ou de la presse ! Si la littérature est un vert pâturage pour lecteurs ruminant, qui aurait cru que les lexiques seraient ainsi engraissés et que l'agriculture serait aussi forcée et polluée !

Désormais, chaque année, le vacher cherche "l'amour dans le pré" aux nitrates, en organisant un speed dating de prétendantes !... Sur l'écran TV LED Full HD, grand jeu de retoquage de bucoliques névrosées, envoyées sur les roses artificielles des amours défraîchies, grande rumination amoureuse de bergères refoulées, envoyées paître à la campagne et transhumer dans les alpages, grande pastourelle bêlante de bergers hystériques comptant sur leur bâton pour donner envie de souffler dans le flageolet.

Eco-buzz permanent ! L'océan médiatique est souillé ! Voguent donc les mises en bouteilles journalistiques de l'onde amère aux algues vertes à l'empire des ondes hydrocarburées !

Alerte à la pollution sonore et visuelle ! Les nouveaux vocables se pressent à la une des quotidiens ou se lancent à la hune des mâts télévisuels. Esquifs surfant sur les vagues du direct et de l'audience, coquilles de noix vides souvent de sens mais pleines de nouvelles expressions ! Ils fluent et refluent sur les pages des baveux ou s'échouent triomphants sur les plages horaires et sonores des access prime time des chaînes publiques ou câblées.

Attention ! Vous êtes perdus si vous avez manqué un épisode et si vous ne savez pas revoir l'émission en replay ! Vous êtes archaïques et ringards, si vous ne savez pas répondre en direct et hashtaguer. L'univers est googlisé, vous êtes en compte, facebookés et vous devez savoir twitter votre pensée raccourcie en signes ou smser en 160 caractères émoticônés. Les vacances se prennent en low-cost dans des apparts Airbnb et vous pourrez compléter votre fitness par des afters zumba !

Holà ! Messieurs les jargonneurs ne faudrait-il pas respecter l'auditeur ? Vous contentez-vous d'être compris à demi-mot ? Avez-vous besoin de réfléchir pour trouver quelque chose à dire ? Parler, vous évite-t-il de penser ou vous permet-il de penser tout haut pour finalement ne faire que du bruit ?

Fondamentalement dire et écrire, n'est-ce pas chercher à être compris ? N'est-ce pas s'adresser intelligiblement à l'esprit, au cœur, à la raison pour expliquer, argumenter, exposer les thèses, développer en antithèses les points de vue et tenter d'en dégager des perspectives ou des solutions provisoires ? Faut-il "néologiser" dans le lisier médiatique pour briller ?

Ne vous écoutez pas parler ! Écoutez-vous ! Voici quelques exemples allergènes pris sur le vif : "Les politiques, ces nouveaux Léviathans doivent être dédiabolisés." Ou bien : "Cette actrice, était un sex-symbol des sixties, aujourd'hui encore, c'est une bombe !" Ou encore repêchée dans la mare aux diableries, celle-ci : "L'examen des fadettes par la brigade financière permettra de prouver l'honnêteté du candidat." Et enfin « Les champs institutionnels de notre environnement se sont bipolarisés socio-économiquement » ....

De quoi intriguer et perdre le brave téléspectateur de tous horizons entre quelques phrases, elles, heureusement compréhensibles ! Car bien sûr, la concentration des exemples cités ici, renforce l'effet caricatural de la charge !

Qui n'a pas parfois entendu ces naïfs commentaires de braves concitoyens à l'encontre d'un journaliste ou animateur : "Il est calé celui-là !"... "Il connaît son sujet."... "C'est compliqué, mais il explique bien." A traduire par : "Je ne comprends pas tout ce qu'il dit, mais globalement, ça va quand-même !" (Sous-entendu, il me rend intelligent.) C'est un peu, comme l'environnement : c'est pollué, l'air devient irrespirable, mais on va, on vient, on vit et on survit quand même ! Au secours !

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