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Articles avec #confidences tag

Lettre à distance : soupirs 2/3

Publié le par modimodi

CDC 69 

Ma tendre amie, mon cher amour, "tu me manques", m'as-tu dit ! Oh ! Je crois savoir ce que tu souhaites !...

Qu'à l'échelle du temps, je te fasse la courte échelle, la plus courte possible !... Que l'espace entre nous demeure un espace vital !... Que cette interruption momentanée de l'image et du son ne soit pas la relâche de la représentation... Que nous ne soyons pas des intermittents du spectacle... Que mes acrobaties du cœur ne te fassent pas le grand écart !

Mais je te l'ai déjà expliqué, tout est relatif dans l'appréciation de l'intervalle de contacts entre deux êtres. Pour l'un, trop loin, pour l'autre, trop près !... La distance et le temps évoluent et se conjuguent dans l'estimation de l'attente des retrouvailles ! Hier, nous allions l'un vers l'autre, à pied, à dos d'âne, en diligence, en omnibus, aujourd'hui, c'est en avion !

Tout s'accélère, nos battements du cœur et nos mots d'amour ! De la missive en malle-poste, au télégramme et au mail instantané ! Hier, ma douce, nous avions nos soupirs pour faire entendre notre souffle, aujourd'hui, de la voix dans le téléphone au direct sur Skype, nos cris du cœur sont désormais parlants et expressifs !

Certes, nous sommes tous deux, dans un intervalle espace-temps distendus et provisoirement séparés par nécessité. Mais comme nous savons garder le contact, nous ne nous perdons pas de vue !...  Tu apprécieras ici, l'ironie de cette expression populaire. Alors ? Même si chacun tourne dans son bocal, ne sommes-nous pas comme on dit "heureux comme des poissons dans l'eau"... même si, nous sommes toi et moi, bouche bée et inexpressifs, paralysés d'attendre. Nous nous efforçons simplement de ne pas nous écraser le museau sur la paroi de l'aquarium de la vie, où depuis belle lurette, nous avons appris à nager.

Attention mon aimée, ma chère absente, entends-moi ! Je t'exhorte ! Ne souffre pas de cet interlude, de ce simple battement du temps ! La non-présence d'un être cher ne signifie pas non plus l'oubli temporaire ou définitif. Elle peut n'être qu'une privation momentanée par impossibilité physique d'être ensemble.

 

Le rêve utopique de l'ubiquité pourrait prendre alors toute sa force dans "Être à la fois ici et ailleurs." Si physiquement, c'est encore impossible, par la rêverie ou les rêves nocturnes, par l'élan amoureux ou mystique, c'est depuis toujours réalisable et bien mieux qu'en hologramme.

Toi, sans doute, ne te l'ai-je pas assez exprimé, mais toi, tu réalises ce prodige ! Tu es en moi, omniprésente sans le savoir et parfois même contre ma volonté. Tu es une part de moi-même, une douce et charmante habitude, la volupté fugace d'un infini délice.

Il est admissible que l'absent qui fait défaut puisse laisser à son partenaire une impression de vide et de désertion. Celui-ci peut se sentir alors seul ou abandonné. Il peut s'isoler et se retirer dans le vallon pour épancher son cœur aux sources fraîches. Il ira peut-être se percher sur un promontoire pour orgueilleusement braver la tempête de son désordre amoureux ! Dans sa quête d'amour absolu, il déclamera aux nues sa mélancolie en traînant son ennui. Laissons-le tendrement souffrir et pousser son lamento romantiquement lamartinien : "Un seul être vous manque et tout est dépeuplé !"

Mais cet état de retrait orgueilleux, de réclusion apitoyée traduit peut-être un manque de confiance dans la solidité de la relation vécue. En effet, l'incertitude spécifique de nos propres sentiments peut provoquer la crainte de tout perdre. Plus l'amour qu'on croit profond est effondré ou creux, plus nous nous enfonçons dans l'abîme de la dépression. Plus l'impression de vide nous happe et plus la séparation est un gouffre qui creuse notre cœur. Il ne saurait en être ainsi pour nous deux.

Au quotidien, le coude à coude, le côte à côte et la main dans la main sont bien sûr préférables au dos à dos ! Pour traverser l'existence, mieux vaut être proches dans l'effort qu'en opposition ou confrontation. Mais on ne peut pas toujours être collés serrés, il faut aussi laisser de l'espace pour agir et individuellement prendre sa place dans l'action.

Mon exquise, il nous faut encore réserver de la marge pour permettre les ajustements du cœur et prévoir des interlignes pour que s'expriment ses silences. Il devient souvent nécessaire de prendre du recul pour garder la lucidité, conserver la vue d'ensemble et faire le point. Une relation est ainsi faite de constants réglages et de régulières accommodations pour conserver, à distance calculée, des perspectives constructives.

Se replier dans l'introspection douce et recueillie ne signifie pas prendre le large, se détacher de l'autre ou l'abandonner. Les sentiments ont besoin de la mécanique de précision du cœur. Le mien, tu le sais, bat au métronome du tien.

Pour toi, pour moi, les poètes l'ont chanté ! Amants unis ou séparés, nous ne pouvons nous approcher du soleil sans nous brûler les yeux. La lumière comme la liberté exigent de se tenir à distance du feu et des entraves. Tout au plus, pouvons-nous vivre les fulgurations de l'amour et tenter d’attraper comme les papillons le font, en frôlant les lucioles, quelques fugitives étincelles. Aimer, c'est chasser les ombres dans la transparence du cœur.

Mon amour de plein ciel, chacun de nous vit et parcourt ainsi son chemin de poussières et d'étoiles. Mais personne ne sait exactement estimer et précisément quantifier le temps des différentes périodes de la vie. Quels intervalles, quelles limites à l'enfance ? Quid de la maturité, de l'automne, de la nuit qui s'avance dans les ténèbres ? Y a-t-il des bornes à la douleur quand le temps coupe les liens ?...

Se plaindre de la distance est parfois le signe d'une propre crainte, celle de ne pas tenir soi-même la distance. Qui ne supporte pas l'espacement, souvent doute de lui. Alors, dans sa course contre le temps, celui-là ne sait pas prendre de pause et n'a pas encore perçu que le silence participe de l'harmonie.

Ainsi, en est-il pour tout homme de la petite musique du cœur. La pause, humble complice du silence n'est pas l'arrêt de la sérénade. Entre nous, pas d'arrêt définitif, pas de brisure, juste une interruption de la ligne, une discontinuité dans l'échange et la présence.

Nous devons être rassurés. Au lieu de nous séparer ou de nous diviser, nous prenons matériellement conscience que l'intervalle nous relie indéfectiblement l'un à l'autre. Il assure nos cœurs d'une permanence de sentiments. "Heureux les amants séparés / Et qui ne savent pas encore / Qu'ils vont demain se retrouver."

 

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Lettre à distance : Intervalle 1/3

Publié le par modimodi

 CDC 68 

Mon amie, mon bel esprit, c'est souvent que tu me dis ou m'écris : "Tu me manques".

Ce soupir, cette plainte, ce reproche ou ce cri m'obsèdent. Qu'expriment-ils au juste ? Les ratés de notre liaison ? Ma maladresse qui a échoué à t'atteindre ou à te toucher profondément ? L'envie ou le besoin exaspéré de me voir ou de m'entendre ? Le vide que mon absence crée en ton cœur ? N'est-ce pas plutôt une expression toute faite, corrélative du dicton : "Loin des yeux, loin du cœur !"

Dans les relations humaines qui unissent socialement ou affectivement deux êtres, la distance est une question primordiale. Comment se tenir ni trop près, ni trop loin pour éviter les confusions et les amalgames, l'oppression jusqu'à l'étouffement ou l'indifférence ? Comment être en adhésion et pas en adhérence ? Quel espace choisir entre l'interstice et l'étendue, l'ouverture et l'impasse ?

En effet, sauf à choisir les tendres effusions du corps à corps, n'est-il pas préférable de veiller à conserver un espace instinctif ou négocié dans le face à face ? La fusion mène à la confusion et le miroir de soi en l'autre n'est qu'une psyché narcissique.

En échanges de communication comme en amour, je me plais à te répéter : "Le plus délicat, c'est de gérer l'intervalle !" Cette gestion est d'ailleurs autant matérielle qu'affective. Qu'il s'agisse d'un départ ou d'une absence, elle s'exprime en intonations, en mesures de longueur et en temps ! Mais nombreuses sont les nuances entre "hors de vue ou hors de portée", entre "au bout du monde" ou "à des années-lumière" ! Importante est la différence entre : "ça me paraît long !" ou "mais, c'est un siècle !" ou encore "c'est une éternité !" 

L'absence, quand elle n'est pas synonyme de disparition brutale provoquée par l'exil ou la mort n'est souvent qu'un éloignement. Les degrés d'intensité de notre perception, notre sensibilité plus ou moins écorchée, notre humeur du moment peuvent nous faire croire à un abandon, alors qu'il ne s'agit souvent que d'une vacance limitée dans le temps.

Bien sûr, ce temps est un temps vécu, c'est le nôtre ! Inutile d'en démontrer ici, l'importance psychologique. Nous avons tous ressenti un jour, le poids de la durée, de moments qui s'éternisent ou d'instants passés trop vite ! Le simple effet des intervalles de temps, pourtant strictement identiques, suivant qu'ils sont appréciés objectivement ou subjectivement, modifie notre perception !

Quand je te dis, "Amour, je serai là dans une heure !" Le laps de temps peut être vérifié sur ta montre mais cette courte absence peut être vécue différemment par toi. La conscience que tu éprouves de la durée de ce temps est alors fonction de ton activité plus ou moins prenante ou de l'impatience irrépressible que tu manifestes pour mon retour ! Gérer l'intervalle, c'est admettre les décalages de nos sensations !

Je me permets d'aviver ton érudition. Tu sais bien que les philosophes Husserl et Bergson ont précisé ces notions en parlant, l'un de temporalité liée à l'activité et, l'autre de durée vécue, de temps ressenti ! Ne trouves-tu pas que nous voilà d'un coup, l'esprit plus léger pour vivre ce manque, ce vide de l'absence ! Évidemment, chacun trouve et donne sa réponse dans le dialogue intérieur entre son cœur et son esprit !

Ne t'alarme pas ! Comment pourrais-tu admirer le soleil qui t'éclabousse de rayons dans la flaque devant toi, s'il n'y avait pas une distance entre lui, l'eau et toi ? Comment te réjouir du chant de l'oiseau, s'il n'y avait pas un espace, entre ton oreille et lui, niché dans le feuillage ? Tu t'enchantes de cette vision et de cette perception sans t’inquiéter le moins du monde de cet écart de position. Alors pourquoi te contrarierais-tu de l'éloignement passager entre toi et moi puisque l'amour rayonne en nous et que nos aveux fredonnent leur tendre mélodie !

Nous sommes toi et moi, en conjonction de pensées et d'intentions. Nous sommes étroitement attachés l'un à l'autre. Sachant que les parallèles de notre intervalle se rejoignent à l'infini d'un absolu d'amour, nous nous aimons, cœurs battants, d'élans en soupirs, à intervalles rapprochés. Nous convergeons dans l'attente d'une prochaine jonction. Notre couple est une alliance d'espoirs, une mise en regard dans la coulisse de notre intervalle.

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Lettre de mise au point - Correspondance amoureuse

Publié le par modimodi

BAL CONF

Suis-je encore libre ?

Ma très chère, je prends la plume, je vous l'avoue, contraint, forcé et à vrai dire, contre ma volonté. Mais vous savez que je refuse ces contrariétés d'humeur comme ces chicanes de passage qui ne sont que de stériles déplaisirs entre vous et moi.

Vous m'avez, ma douce amie, demandé de vous écrire autre chose que les habituelles banalités amoureuses. Vous n'aimez pas les lieux communs ni les déclarations d'usage. Vous en avez assez de mes répétitifs je t'aime, jetés aux quatre vents par mon cœur girouette et ma petite tête en l'air !

Je proteste et tempête ! Pourquoi l'amour, le nôtre surtout, serait-il plus original qu'un autre ? Pourquoi le temps épargnerait-il sans les marchander, nos quatre saisons d'aimer ? N'est-ce pas, parce que votre vie est soumise à leur cycle, que vous avez parfois l'impression de tourner, comme la terre, sur vous-même et en rond ?

Oui ! Je peux satisfaire vos caprices, me précipiter comme l'averse soudaine et vous écrire sur le champ, en renversant l'encrier et en couchant les herbes folles et en bataille de mes déclarations échevelées ! En ce jour même, mon cœur peut vous donner des mots en bourgeons de printemps pour s'accorder à vos reproches déjà chargés des larmes rouges de l'automne. Je pense parvenir à vous faire regretter les trahisons des branches, lourdes et cassantes du gel de votre amertume. Je peux vous offrir les frissons de fleurs enivrées, d'une sève ciguë en leur calice. Car voyez-vous, ingrate, en nature comme en poésie d'amour, les vers sont dans le fruit !

Mais, à quoi bon, pour le réchauffer, couvrirai-je votre cœur frileux de mes plumes d'oie d'écrivain ? Pourquoi devrai-je accorder du renouveau à mes missives et mettre mes idées en semailles, puisque je suis sûr que, le moment venu, vous viderez mes mots comme des pommes, sans même penser à en boire l'eau-de-vie.

Oui ! A ma guise, je suis en capacité de tout vous donner, du meilleur de moi-même... Je sais que l'été, est votre saison d'aimer préférée ! Je peux vous promettre les beaux jours, le soleil levant, l'éther le plus pur et la mer immobile piquée de voiliers blancs. Je vous offre les fleurs, les fruits et la lumière.

Je peux chanter le sublime d'un instant somptueux, la pureté d'un trille, la beauté d'un panorama ouvert comme votre cœur sur le plein ciel. J'ai l'art de célébrer la transparence de l'air et ses vibrations, le charme intime de votre présence quand votre corps est en offrande et le don de versifier à loisir, des odes et des sonnets romantiques ou lyriques. Je peux vous écrire sur le sable des paroles de vent, à faire gonfler les dunes de votre cœur. Mais à quoi bon ? Et pourquoi tracerai-je nos initiales enlacées, si vous êtes l'écume qui emporte mes traces ?

Voyez-vous ? L'amour circonscrit ses signes de cœur, calque sur le hasard, les échéances de ses lignes de chance. Il projette même les ombres désertées des sentiments en fuite. Vous n'avez pas le pouvoir de délimiter en moi, comme en vous, l'immensité des possibles émotions. Vous ne sauriez borner nos intuitions, juguler nos sensations, freiner le cours de nos pensées ni programmer nos souvenirs. Nous ne pourrons jamais nous aimer contre notre volonté et nous émouvoir sur commande. Nous ne serons jamais rigoureusement semblables, sauf à faire semblant.

Je ne voudrais pas être soumis à votre exigeante influence et écrire sous la dictée, tous vos souhaits ou vos diktats. L'unicité de l'amour réside dans nos expressions singulières et nos élans pluriels. Aurions-nous même la possibilité d'être dans le même ton, nous ne serions pas pour autant, au diapason ! L'harmonie entre deux êtres n'est jamais préétablie. En amour, les coïncidences ne deviennent des correspondances de sentiments que lorsqu'elles sont en concordances.

Les lignes tracées sur le papier sont éphémères et plus légères que les lignes musicales sur la portée du destin. L'encre finit un jour, par sécher dans l'encrier comme vos propres larmes, qui ont un jour fait pâlir les signes et les mots que nous avions échangés.

Pourquoi voudriez-vous, vous arroger le droit de prendre nos sentiments au pied de la lettre pour en faire d'abord une, puis de nouvelles correspondances amoureuses ? Pourquoi êtes-vous récalcitrante à la rapidité bien plus pratique des courriels et exigez-vous exclusivement des courriers ? Prenez-vous du plaisir à attendre et du moral à espérer ? Ô ma très chère, n'est pas Pénélope qui le veut.

Allez ! Je vous mets en garde ! N'allez pas prendre tous mes petits pas vers vous, à contre sens. N'égarez pas mes indices amoureux à contre-voie de votre cœur. Ne placez pas mes preuves éclatantes à contre-jour et mes rimes à contre-pied. Sur les tablettes de votre cœur, j'avais gravé des hiéroglyphes, j'avais enluminé et imprimé des incunables en préservant la marge et les marges, d'énigmes comme d'erreurs ! Vous ne deviez ni les effacer ni les égarer.

Avez-vous douté de leur authenticité et de leur persistance ? Hésiter, ce n'est pas tromper l'autre, c'est parfois se tromper par incrédulité. Sachez, ma confidente, mon amour de toujours, qu'il n'y a jamais d'écrits vains, si les tendres mots des aveux s'impriment définitivement en l'autre.

Si vous ne vous êtes pas dissipée, ni vous n'avez pas estompé vos primes émotions et grisé nos souvenirs, vous me possédez déjà. Mon cœur vous appartient dans nos confidences échangées et l'écho, même lointain de ma voix. Vous avez la possibilité de ressusciter, à loisir, mes fiévreux émois exprimés avec passion dans ces nombreuses correspondances parfumées et enrubannées. A condition, belle inconstante, que vous n'en n'ayez pas fait un feu de joies réduites en cendres !

Sans doute, avec le temps, estimez-vous que je me sois éloigné de vous. Il n'en est rien ! Sachez que je vous aime toujours à distance et à perte de vue ! Alors, en synchronie de nos deux cœurs, aimez-moi à votre tour, les yeux fermés. Oui ! Au fond de mes pensées obscurcies, cet amour m'avait aveuglé et j'aurais peut-être dû avec doigté, vous écrire en braille ! Parfois ressentir est plus utile que voir !

Malgré toutes les réticences que je vous ai exprimées doucement mais fermement, je suis contraint de constater que vous persistez encore dans votre requête ! Alors soit ! J'accepte de reprendre la plume.

Et comme nous en avions convenu : entre nous, il n'y aura pas de mièvrerie ou de sensiblerie à deux sous ! Vous espérez de moi que j'aie à nouveau du répondant. Alors soit ! Même si je demeure quand même, bien hésitant...

En effet, je ne pourrais que répéter en les copiant les déclarations de mes premiers élans. Je ne suis pas un copy cat, serial lover ! Les mots n'auront plus la même fraîcheur de l’innocente spontanéité. Je ne suis pas un tricheur de sentiments ni un expert en faux-semblants. Vous en êtes avertie et consciente, je l'espère !

Alors, ne vous attendez pas à trouver ici, sous ma plume, l'obole d'un billet doux et quelques galanteries d'aigrefin cavaleur. Quand l'amour est un faussaire, il faut rendre la monnaie, à ses cinq lettres de créance et ne pas trébucher pour y donner le change. Je vous fais donc crédit d'avance et je vous fais déjà contre mauvaise fortune, bon cœur !

Banco donc, si c'est pour vous plaire ! Je vais tâcher de me montrer inventif et succulent d'amour. Vous pourrez vous payer au magot de ma prose, au gousset de mes phrases et croquer de la galette aux amandes de mes mots. Goûtez donc à nouveau, l'amour comme une friandise !

Prenez mon cœur pour argent comptant et mes prochaines lettres comme un capital confiance, à placer et à conserver ! Qu'importe les aléas des futurs rendements épistolaires, c'est peut-être l'assurance-vie, voire survie de notre amour ! On ne sait jamais, peut-être, avez-vous raison et avons-nous intérêt, en cœurs et en corps, à nous épargner, l'un et l'autre !

Mais ne perdez pas mes missives adressées cette fois, en poste restante de votre cœur.

 

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Lettres d'a.m.o.u.r. Exaspérément ! 4/6

Publié le par modimodi

BAL CONF

Exaspérément

Mon amie de toujours, je désespère de n'avoir reçu à ce jour, aucune réponse à mes lettres d'amour ! M'enverriez-vous sur les roses que je vous ai si souvent offertes ?

Je fais la soupe à la grimace. Ah ! Quelle vilaine panade dans laquelle mes messages trempent leurs attentes ! Mon âme, mon amour, avec vous, tous mes mots sont jusqu'à présent restés, lettres mortes. Ici, et devant la postérité, je jette de nouveau, l'encre sur cette ultime épreuve.

Dès que, je vous ai dit et écrit : A.M.O.U.R. Vous vous êtes moquée de moi et m'avez répondu les cinq lettres. Miel et crotte, alors ! Nom d'une vieille bique, je tourne chèvre et me voilà, votre bouc émissaire, englué dans la mélasse de vos mauvais sentiments !

Je me rappelle comment tout a commencé. J'aurais peut-être dû me méfier... Dans une fausse aisance, vous aviez pris votre air pincé pour m'exprimer vos mauvais sentiments et je m'étais vu contraint de me boucher le nez !

Depuis des mois, ma belle à la taille de guêpe, vous me filez le bourdon. Je zonzonne, j'agace, je vous agace ! Je taquine comme une mouche à bœufs, au taon en emporte le vent arrière ! Je m'agite comme une lucilie sur une bouse de cet amour vache ! Chercheriez -vous peut-être, à m’attraper au vol pour vite me coller ? M'attireriez-vous à vous pour me faire prisonnier et m'offrir en ruban, un beau papier tue-mouche ?

Si mes pattes de mouche, faute de pouvoir faire mouche, s'engluent sur le papier, ne prenez pas la mouche et ne dites pas, piquée : "Ce ne sont que pâtés pour des sujets en croûte !" Ah ma mie ! Si au moins, je pouvais la gagner cette croûte cassante en même temps que votre tendre amour ! Mais je suis au pain sec et à l'eau de boudin !

Je vous ai donné mon cœur, prêtez-moi au moins votre attention ! Je voudrais être votre fauteur de troubles et d'émois. Venez-moi en aide et pardonnez-moi aimablement mes fautes ! Oui ! Je l'admets ! Je suis sot en trois lettres ! Je suis un ignorant, résumé en trois mots, je suis âne, alpha, bête !

Je suis un illettré, votre illettré d'amour.

A comme l'abécédaire d'un bébête syllabaire ! A comme abaissé, décédé, effacé, cédé et excédé d’être jeté aux oubliettes des ouï-dire !

M comme maladroit et malchanceux ! M comme mes mots présentés en mémo ! M comme mal aimé ! M comme aimanté et par le j'aime, hanté mais également enté, par vous aimable fleur. Hélas, de crise en t'M !

O comme obstiné, un faux héros mais un vrai zéro, un O, méga ! Oh oui, bien méga, l'O ! Surtout depuis que vous m'avez prié moi, votre amant alpha et votre gros bêta d'aller me faire voir, chez les Grecs !

U comme ultime appel ! U comme unième promesse d'une réponse ultérieure. U comme l’unisson de cris en ultrasons, délivrés en urgence. U comme usure du cœur. U comme utopique attente et bonne heure usurpée.

R comme érodé, rabroué et rabougri, rabat-joie et l'air de rien, spécialiste de l'air du départ, comme vous ma cruelle fille de l'air !

Les mots de mes écrits sont beaucoup trop légers. Ils se sont envolés comme des graminées au vent de vos soupirs d'amour ou d'exaspération ! Je ne voyais que du bleu, à présent je broie le noir de l'encre répandue pour rien sur mes papiers jaunis.

Ma Muse, petit amour de mes mamours ! De lettre en lettre, je tente de correspondre avec vous, impossible déesse. Exaspérément, je m'obstine en relances ! Pourquoi pour vous toucher au plus profond de l'âme, contraignez-vous mon style, en quelque effet coulé, à faire craindre le fond ? Pourquoi affirmez-vous que ma forme empotée et que son ton piteux, vous ont chargé la langue au point de la tirer ?

Souvenez-vous-en ! Ô fin bonheur ! J'ai pris langue avec vous, un beau jour de printemps. Nous étions déliés, pas de langue de bois pour nos baisers fourrés. Comme deux pommes d'amour, rêvant à leurs chaussons, nous nous sommes tenus chaud et avons échangé plus de sept fois, nos langues à pleines bouches ! Il n'en est resté, pas même une miette !

Je veux donc vous aimer sans rester sur ma faim. Je veux vous espérer dans la pleine lumière. Voyez ! Mes mots et mes lettres scintillent. Je ne suis pas brillant, je suis illuminé, comme le nez-fraise d'un moine vigneron et mes lettres pour vous, sont toutes enluminées. Je fais des étincelles dans le feu de l'action.

Mais aussitôt, pourquoi mon ange, me dites-vous : Non ! Mais ! Halo, quoi ! Une lueur, c'est pas du lux ! D'ailleurs, pourquoi attendrai-je que vous vous éclairiez à ce genre ampoulé, si c'est pour me moucher, d'un "File, file amant, te consumer ailleurs !"

Je persiste pourtant, je signe d'un cœur écarlate en bas de chaque lettre. Jusqu'à présent, je persévère en vains écrits et vous supplie, ma douce ! Je voudrais vous convaincre : Venez, venez chez moi, car je vous en ai écrit des tomes, at home! Ô mon amour, des livres et moi, pour vous et pour toujours !

Prenez-moi, sans jambages à la lettre et sans ambages, cessez de m'imposer un style aussi châtié ! Acceptez que ma plume gauloise s'encanaille, love you ! Que le pitre fasse l'épître, que l'auteur soit à la hauteur, que mes idées à tout crin et à tout poil démangent le gratte-papier plutôt qu'elles ne vous barbent ! 

Mon drôle d'oiseau, mon albatros, j'arracherai les plumes aux mots en liberté, aux chouettes, aux fous et même à quelques queues d'oiseaux, pis que tout, verts ou à rouge gorge, afin de vous séduire !... Oh ! Ma mie, mi-pinson, je vous réveillerai de quelque écrit, coq as !... Hélas, ô ma volage, fugace inspiration, vous ne me laissez souvent que les plumes du croupion !

Je suis votre poète ! Pardonnez la licence de ce chant d'amour en acrostiches et accroche-cœur ! Je me jette à vos pieds, évitez le rejet. Ne vous écriez pas : "Ouste, tes rimes ailleurs, vire, vire-les !" Sinon, je me mettrai aux vers, quatre à quatre, pour vous chanter ma ritournelle, à tire d'ailes d'hirondelles, à tire d'ailes d'alouettes, si vous ne me plumez pas la tête !

Ma muse courtisée, je voudrais à jamais, vous compter fleurettes de rhétorique et vous mettre en pensées dans mes pages pour venir vous humer, vous presser, vous donner l'accolade et pouvoir vous écrire, sans hésiter jamais : L'amour est ma mort sûre... L'amour est ma morsure...

Avec rime et raison, reconnaissez au moins, ma biche au bois, que je suis votre poète couronné, d'un reste de vers durs ! Mais vous, pour vous moquer, vous mâchez mes lauriers !

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Lettre d'un philosophe à sa libre amie : Liberté, chérie ! 4

Publié le par Modimodi

 CONF  32  

Entends-tu chérie, je ne renoncerai jamais à ma liberté chérie !

Tu y es heureusement, toi aussi, attachée. Pour mieux l'exercer, nous aplanissons les obstacles du quotidien, autant par notre volonté en actes que par les preuves de notre amour.

Pour y goûter, nous sommes attentifs à débloquer nos malentendus comme à dénouer nos dissensions. Je suis ton Houdini, tu es ma Pénélope !

En nous, l'esprit de liberté passe par la libération de nos entraves forgées dans nos hésitations, nos mesquineries, nos égoïsmes provoquant le désordre dans nos sentiments. La lutte est permanente et l'exigence est de chaque instant pour que nos cœurs aimants puissent se soulager des poids inutiles des doutes et des rancœurs.

Oh oui ! Nous sommes nos propres prisonniers ma belle geôlière ! Il n'y a guère que pour nos corps à corps que nous n'hésitons pas à nous jeter l'un contre l'autre et à nous écrouer sans chercher à nous libérer. Nous en perdons la tête au grand bonheur des oubliettes !

Au quotidien, nous fréquentons l'école supérieure de la discipline et les cours du soir du plaisir. Nous pratiquons assidument même s'il faut bien avouer les dissipations de quelques jours buissonniers, mais bizarrement, jamais en soirées !

Mon doux bonheur inespéré, pour garantir notre tranquillité, nous évitons aussi les lâches renoncements. Dans la discussion, il est aisé et parfois tentant de laisser l'autre l’emporter pour ne pas avoir à exprimer son avis ou à discuter ses arguments. Entre nous : pas de "bien faire" à sa guise et de "laisser dire" à loisir, sa chère moitié qui vous parle mais dans le vide. Car la résignation est un refus de liberté. Quelle belle arnaque de ceux qui vous disent que "le silence est d'or" !

La liberté kantienne que nous vivons, est guidée par notre raison qui fait la part distinctive entre nos intentions et nos actes. Ainsi nous garantit-elle la joie d'être et d'agir ensemble dans les joyeux mouvements de la vie. Le régal, c'est de faire durer le plaisir.

Dans toutes ses nuances philosophiques, la liberté que nous avons unifiée en nous, est notre mobile. Ô toi, ma fille de l'air, ma sylphide, mon oiseau bleu, ma colombe de la paix, la préserver et la garantir est de notre responsabilité. Oui ! Nous voulons conserver, dans la durée, la qualité de notre bel amour !

Nous ne vivons pas en vase clos, tu t'y dessècherais ma tendre fleur de délices. Rien n'est figé en nous ou autour de nous. Nous sommes ouverts l'un à l'autre et au monde. Nous employons notre temps libre aux plaisirs de l'étude comme à des loisirs sains et authentiques, sans oublier les subtiles jouissances de la passion et l'extase de nos offrandes.

Nous avons su désencombrer nos vies des importuns et dégager du temps de respiration et de jachère, pour réfléchir, approfondir et explorer la nature et les arts. C'est libres d'aimer que nous prenons le temps d'aimer et l'heureux temps de nous aimer. Nous échappons à l'usure des sentiments et à l'inconstance des instants trop vite enfuis, en sortant de notre petit nuage rose pour nous jeter dans la lumière.

L'étonnement est la première qualité du philosophe. Le savoir et la connaissance participent du principe émancipateur de la liberté. Celle-ci n'est pas vacuité ni vide de l'esprit. Nous sommes toujours disponibles, l'un pour l'autre mais également pour la nouveauté et l'apprentissage. Nous vivons en suspension entre sursauts et surprises.

Nous veillons à demeurer accessibles l'un à l'autre, parce que nous avons compris que la liberté est un enjeu de chaque jour. Nous avons la chance d'avoir, toi et moi, un bon capital santé. Nous y prenons garde, en vivant sainement, car comme l'a dit Leriche, la liberté, c'est "la vie dans le silence des organes". La maladie asservit l'homme et le limite dans son activité.

Nous vivons libres, parce que nous ne vivons pas dans une révolte permanente. Nous n'avons pas choisi nos parents, notre capital génétique, nos dons et nos capacités. Mais nous savons que même, en nombre limité, nous avons en nous, des virtualités, un potentiel que nous devons révéler...

Et une vie, c'est bien court ! Alors nous vivons pleinement ce cadeau providentiel. Mais nous n'avons pas non plus le choix, notre destin est déjà tracé. Un jour de pénombre, nous mourrons. Nos cœurs lourds ou légers, nos esprits lumineux et nos âmes confiantes, migreront vers l'Orient éternel pour un séjour espéré de claire lumière.

Pour être libres, nous savons qu'il nous faut accepter l'inéluctable sort, ces impondérables de la vie, constitutifs de notre existence. Ainsi, l'homme libre commence par accepter sa propre histoire avant d'approuver l'histoire du monde, les événements et les faits. Bien sûr que c'est difficile à vivre !

La liberté a toujours un poids d'origine, léger d'insouciance comme une plume d'oisillon puis lentement alourdi d'espoirs, de concessions, de renoncements, ces petites tares de la conscience. C'est à partir de cette introspection que se dégage l'inévitable constat. Alors, notre raison et notre volonté d'adultes nous permettent d'agir sur notre vie.

Chaque fois que nous restons englués dans notre passé, prisonniers de nos peurs, de nos contraintes et de nos regrets, nous ne sommes pas libres et nous ne pouvons pas le devenir. Nous nous libérons de ce poids par les joies, les plaisirs et les rêves. Nous composons avec nos désirs sans les transformer en impérieux besoins.

Ma tendre amie, nous avons pris place peu à peu dans le monde où nous agissons. Nous avons tenu à donner sens à la philosophie de l'action. On nous a enseignés que c'est à partir de ses engagements que l'homme devient et vit en être libre. Encore convient-il qu'il parvienne à se réaliser, à travers les faits de l'actualité et de son époque.

Il est actif, il éclaire son propre destin, en s'adaptant à l'évolution de son environnement, dans lequel il prend part, et ce, même modestement mais pourvu qu'il y affirme sa pleine responsabilité. Nous construisons ainsi les conditions de fonctionnement de notre union et le bonheur de notre libre amour.

Amour constant, merveilleux don du ciel, ainsi réalisons-nous, au mieux l'idéal dans le réel. Notre liberté est comme un papillon, elle est toujours agitée et fugace, de passage et virevoltante, insaisissable et éphémère comme nos multiples faits et gestes, dans la précarité de l'instant et la fuite incessante du temps. Elle doit se réinventer et se reconquérir en permanence comme toi et moi. Nous le prouvons en nous employant à l'émancipation de notre amour, comme l'univers, toujours en expansion.

Chérie, la liberté, notre chère liberté est dans le pouvoir d'agir et dans le pouvoir de penser. En effet, agir, être utile, travailler, produire et partager sont les conditions sociales de l'exercice de la liberté de l'homme. Celui qui a faim ou soif comme le miséreux ne peut avoir la sensation d'être libre. Notre confort quotidien facilite nos efforts.

De même, les velléitaires qui ne font que vouloir vouloir, sont des chimériques, comme le disait ce cher Voltaire dans "Le philosophe ignorant". Mais ce ne sont pas non plus des êtres libres, au sens plénier du terme ! En effet, ils ne peuvent pas se déterminer par eux-mêmes, donc être autonomes.

Mais, si notre liberté fait de nous des sujets de pensée et d'action, des êtres responsables, ce sont aussi, si nous n'y prenions garde, nos besoins, nos désirs et nos passions qui nous transformeraient, en objets sociaux et en esclaves. Ils nous entraîneraient irrémédiablement en abandon de liberté.

Nous résistons tant bien que mal aux tentations dérisoires ou frivoles. Nous aimons donner du sens et de la sensualité à cette pensée biblique : "L'esprit est vif mais la chair est faible". Nous aimons trop nos défaillances !

Nous prenons garde et prêtons attention à la vie girouette, aux séductions faciles, aux plaisirs immédiats des cœurs à découvert. Notre amour ne doit suivre que la rose mais pas celle des quatre vents. Autant qu'en emporte le vent, l'amour nous emporte dans la liberté des zéphyrs et des alizées. C'est là, dans la volupté des envols et de nos charnels abandons, que notre amour s'effeuille.

S'il faut laisser s'exprimer spontanément nos tendances et nos préférences, nous n'oublions pas, toi et moi, les enseignements de Platon : "Nous n'avons pas conscience d'être libres, quand nous succombons aux passions". Bien sûr, ma petite coquine, quand nous nous lâchons un peu, nous offrons avec de grands plaisirs, des moments de relâche à notre liberté ! Oh oui ! Comme c'est bon d'être au spectacle de l'amour libre et polisson et mieux encore d'y être deux acteurs inspirés et expressifs !

Toutefois, comme le dirait "le Père la morale" : "Attention à toi, à nous, mon Ève, ma tentatrice, ma pomme de Paradis éternel !" En effet, dans la course à l'abîme, celle du paraître et de la consommation effrénée, nous courons grand risque de nous assujettir à la futilité et de nous asservir à la tyrannie de la satisfaction immédiate. Trop de nos contemporains vivent ainsi ouvertement, sans choisir, enchaînés à leurs pulsions et à leurs envies.

Heureusement, nous savons toi et moi, nous conformer, sans être de parfaits conformistes. Nous tentons au maximum de nous "déformater". Car si nous sommes libres de penser, nous avons acquis la certitude qu'il est difficile de garder des pensées libres et originales, personnelles, singulières et dégagées des influences de l'air du temps.

Pour aimer et pour penser vraiment, il faut assurément, rester des oiseaux d'envergure. Nous sommes deux albatros, empêtrés et maladroits sur le plancher de l'existence mais toujours volontaires pour nous envoler et libres d'élans pour nous élever dans les tourbillons de la vie et de l'amour !

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Poisson d'avril, mon vieil ami !

Publié le par modimodi

 CDC 44

Mon cher Didier, en ce premier avril, je t'ai réservé une surprise épistolaire ! Je viens évoquer avec toi quelques souvenirs, en vieux camarades de classe que nous étions. J'espère que tu as gardé ton esprit espiègle et que tu retrouveras dans ce papier, quelques-uns de nos joyeux moments !

Si hier, gentil petit garçon, je faisais risette à maman Lisette, aujourd'hui dans la tête, j'ai l'impression d'avoir toujours 10 ans ! Je n'ai pas vraiment grandi. J'ai toujours envie de faire des facéties ou de gentilles surprises. Gamin, adolescent, adulte, l'esprit de fantaisie ne m'a jamais quitté.

En est-il de même pour toi, dans ton sérieux métier de commissaire aux comptes ? Peux-tu encore compter sur l'inattendu de la joie et quelques plaisanteries pour te soustraire à l'austérité des chiffres et divertir ton existence ? As-tu conservé ton capital d'inventivité et de drôleries ?

Le 1er avril, c'est pour toi et moi, notre fête de gaieté symbolique, la fête de notre enfance de ris, de jeux et de papier froissé. C'est la nouvelle année de joie, la prime journée pour de nouveaux caprices ! Pour les éventuelles faces de carême prenant, j'ai un beau slogan : Au poisson, l'an neuf ! Alors, comme au temps de Charles IX, je te dis : "Bonne année de farces et de blagues" ! Laisse-toi prendre à l'amorce du plaisir.

Te souviens-tu, ami, de l'heureux temps de notre école ? Revois-tu la cour de récréation où nous jouions à attraper les couettes et les bonnets des filles et où nous déchirions déjà nos cœurs et nos blousons ? Chaque jour, nous inventions de nouveaux jeux pour les taquiner ou leur plaire.

Te souviens-tu des découpages de feuilles, arrachées à nos cahiers et des reproches convenus du maître ? Les retrouves-tu, ces poissons aux écailles bleues, aux arêtes grises et aux yeux rouges et jaunes qu'on accrochait, en douce, au dos de nos camarades ?

Les entends-tu ces triomphants "poissons d'avril !", quand on avait réussi à les surprendre ? Quel plaisir de les voir étonnés, désignés du doigt et moqués par leurs congénères ! Quelle rigolade à les regarder se contorsionner pour décrocher l'intrus. Exercice d'autant plus délicat, si on avait réussi, comme tu y excellais, à le coller, bien haut, entre les deux omoplates, au moyen d'une grande tape amicale et d'un tonitruant : "Salut, mon pote !"

Moi, j'ai gardé mon âme d'enfance, je te l'assure ! Mais hélas, dans la vie, on n'échappe pas aux jugements des autres ! Dans le courant des jours, j'en ai connu des gens sérieux, importants, souriants mais à la dérive dans les eaux stagnantes de leur fatuité. J'ai parfois subi leurs regards désapprobateurs ! Si un jour, il a été dit que tous les petits poissons deviendront grands, tous n'ont pas mordu à l’hameçon de ma drôlerie.

J'ai frayé et parfois ressenti leur condescendance dans leurs sourires pincés ! J'ai connu les remous narquois de leur dérision et gobé leurs quolibets sarcastiques. Je me suis débattu au fond de l'épuisette et j'ai été, couronné d'algues vertes, la risée du festival de cannes à pêche !

Pour les convaincre et ne pas perdre la face, j'ai peut-être parfois poussé un peu loin le bouchon en leur disant que la vie est une farce qui cherche à vous faire mordre à l’appât puis à noyer le poisson. Hélas ! Certains n'étaient que des poissons plats et de passage qui cherchaient à jouer les anguilles sous roche. Ils se sont bouchés les ouïes.

Ah ! J'en ai connu des espèces de toutes sortes : de casse-pieds poissons scie, de joyeux poissons volants et même des poissons-chats qui frétillaient de la queue. De drôles d'oiseaux, des hirondelles de mer. Des poissons-lunes qui prenaient leurs vessies natatoires pour des lanternes. Des anges de mer, des blondinettes et des roussettes qui se prenaient pour des sirènes.

J'ai bien sûr fait quelques touches mais il n'a jamais été question de venir me taquiner le goujon ou de me tendre la perche. J'ai évité de courir les bars afin de ne pas fréquenter les églefins, les maquereaux, les merlans frits, les thons, les grosses plies et les morues. Je n'ai jamais aimé non plus les harengères et les belles poissonnières qui vous promettent l'amour et vous font mariner.

Dans le vivier de ma mémoire, dans mes souvenirs en boîte ou du même tonneau, s'ils se pressent comme des sardines et des harengs en caque, ils restent frais comme des gardons.

Je n'ai jamais perdu le moral ni le sens de la facétie. Au contraire, en croisant les brèmes ou les tanches, les muets comme des carpes, les lieus communs, les têtes de brochet ébréchées, je les ai plaints d'avoir perdu la gaieté, la malice, la vivacité et la légèreté d'esprit.

Moi, je suis resté joyeux et heureux comme un poisson dans l'eau ou curieux, bouche ronde et ouverte comme un poisson dans l'aquarium. Je suis toujours un cabot nerveux sur les planches du quai d'embarquement de la curiosité et je vis au bonheur de la truite arc-en-ciel.

Alors toi, mon ami des premiers jours. Toi, qui n'as jamais fait une moue de dédain devant mes foucades ou mes outrances, je t'ouvre mon cœur et te dédie, en ce beau jour, ce joyeux billet de bons mots iodés, cette lettre-carte postale enluminée de ma fantasque amitié. Je n'ai pas cessé d'aller à la pêche aux bons mots et toi, tu sais que ce ne sont que des mots pour rire.

Chez moi, nulle malveillance, juste un peu de folie d'un fou de joie qui cherche à donner des fous rires à toi et à ma matelote. Être foufou ce n'est pas être fou, c'est être un poisson clown, un amuseur pour le menu fretin et la galerie, un pitre avec voix au chapitre ! C'est avoir le privilège d'être un poisson de roche, spécial bouillabaisse vendue, sur le Vieux port.

Je suis immanquablement de la grande famille des pêcheurs qui se fendent la pêche ! Je fais partie des branquignols, un peu cinoques, un peu loufoques. Je suis un artiste cocasse au cirque de la vie ! Déjanté peut-être, mais seulement dans ma tête ! Je sais rouler sur mon petit vélo et tenir ma ligne droite en évitant les queues de poisson.

Dans mon enfance, je n'ai pas pris de coup sur la cafetière, je ne suis donc pas fêlé, frappé, marteau ou à la masse, encore moins requin-marteau ou dans la nasse, tête de bourrique et de bourriche.

Je suis sûrement un peu cloche mais pas sonné, cultivé mais pas ravagé, débordant mais pas siphonné, droit dans mes hautes bottes de pêche et pas tordu, sauf de rire. J'ai plein le filet poissonneux, de chimères à vendre à la criée ou à saler avant de les congeler.

Mais rassure-toi, je ne suis pas pour autant givré du citron et encore moins toc-toc car je te fais aussitôt des réparties du tac-au-tac ! Si tu te laisses appâter, je te harponne et te mets le grappin. D'ailleurs, je serais encore prêt à te ferrer si tu ne faisais pas gaffe !

Je revendique le droit de rire et de plaisanter, de chiner et de taquiner comme de pêcher par optimisme. Je me jette à l'eau car je travaille sans filet mais pas sans provisions. Je me réfère à La Farce de Maître Pathelin, à son esprit espiègle et satirique, retors, rusé mais toujours comique !

Tu le sais ! Un éclat de rire est moins blessant qu'un éclat d'obus ou qu'une vicieuse arête en travers du gosier. En dehors de la bouillabaisse et de la poutargue, une pinte de bon sang vaut également un bon bifteck sans compromettre ta ligne. Mais en ce jour privilégié du 1er avril, tu as raison et bien sûr, le droit de préférer le poisson ! J'ai d'ailleurs mis toute la sauce !

Si je t'avais agacé par ces petites taquineries, je réclame un droit de repêchage. Car tu peux toi aussi, te déboutonner et rire à gorge déployée ! Tu peux être défrisé et te poiler comme une barbue ! Tu peux en avoir pour ton argent et te fendre la tirelire comme une raie ! Tu peux toi aussi rire comme un bossu qui en aurait plein le dos des écailles de mon mauvais humour. En ce jour jubilatoire, tu pourrais même rire comme une baleine, qui trouve un banc de poissons d'avril !

Salut, ami ! Ne sois pas lamproie au doute. Je ne te quitte pas en mettant le turbot ou en te faisant une ultime queue de sirène. Je ne voudrais ni te laisser à ton saur, ni te mettre à la traîne ou pêcher davantage, en te montant en bateau. Ne prends pas la mouche de mes touches d'humour.

Au final, sache que j'ai gardé la légèreté de l'hirondelle de mer et la rêverie du poisson-lune. Si je prête à rire, je m'empresse de te prêter le bonjour et n'étant pas un poisson de passage, je te donne pour toujours ma fidèle et sincère amitié."

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Lettre à mes semblables - Correspondances

Publié le par modimodi

BAL CONF
Tu le sais
, toi, mon double, mon jumeau de la vie, nous ne pouvons vivre sans nous correspondre ! Nous nous ressemblons, traits à traits, on nous confond souvent ! Nos symétries physionomiques nous ont rendu solidaires car nous jouons avec les confusions, même celles de nos proches. Ils nous croient homothétiques ! Nous rions en connivence, dans une totale complicité de leurs plaisants quiproquos !

Pourtant, mon frangin d'amour, l'apparence de nos similitudes n'est qu'un piège. La copie conforme est une douce illusion visuelle ! Il y a bien entre toi et moi, un premier né, un aîné qui a eu la primauté de goûter à la tiédeur du jour ! Je suis ton puîné de la saint Benjamin, le cadet de tes soucis ! Tu es un aventurier de la vie, un devancier qui a recueilli les premières exclamations, les premiers compliments et les primes caresses. Aucune jalousie ni amertume dans ce constat, puisque tu es le pionnier de l'existence qui a originellement reçu les émois maternels, l'indispensable douceur, préalable aux plaisirs des jours promis. Et je suis encore et toujours un valeureux et impatient second, qui frappe à la porte de la lumière, qui la pousse, qui vagis et qui crie : Et moi ? Et moi !

 

Tu le pressens ou tu le sais aussi, toi, qu'on dit étranger, alors, que tu es mon semblable en humanité ! Même si nous ne sommes pas frères en gémellité, nous sommes en correspondance et en fraternité terrestre ! Tu es un autre moi-même, un œuf fécondé par l'amour ou le hasard ! Mais tu es surtout l'éclosion du bonheur d'exister, tu es la création de tout espoir, fragile certes, mais lié par le fil ténu de la vie.

Même sous les bombes ou dans le dénuement, tu es le miracle principiel de la vitalité, le dynamisme et l'énergie primale, le souffle primordial. Tu es la genèse d'un monde nouveau, l'origine d'une histoire à écrire d'une plume aussi légère que le vent ! Tu es l'aurore d'un jour de plein ciel étoilé, sur la voûte du temps ! Ôte vite ton bandeau pour atteindre la claire lumière. Tu portes déjà en toi, sans le savoir, le début et la fin, comme les racines ignorent la cime de demain !

 

Tu le ressens aussi, toi, ma moitié, mon symbole que l'amour unifie ! Nous sommes en correspondances, nous nous ajustons et nous nous accolons pour rester soudés, l'un à l'autre ! Nous faisons bien plus que nous accommoder ou que nous conformer ! Nous affinons nos affinités. Nous cherchons à concilier nos différences, à harmoniser nos singularités et à être, encore et toujours en accords et en corps à corps ! Nos anneaux échangés scellent notre alliance ! Et même si, au départ, nous n'avions rien de commun, aujourd'hui, pour faire cause commune, nous avançons main dans la main, dans la clarté vers lumière ! Nous sommes des bourgeons en promesse de fleurs, en présage de fruits !

Dans la symphonie de la vie, nous accordons nos violons, nous sommes au diapason, dans le ton et de concert ! Mais nous le savons, il n'y a pas d'accord à vie, nos tendres liens ne sont pas des garrots ! Nos lèvres se déclosent. Le brouillard des aveux, la brume des serments, dans l'azur de l'amour se fondent et s'évaporent.

Au quotidien d'aimer, dans le gris-bleu des habitudes, nous cherchons toujours à partager nos avis et nos sentiments en bonne intelligence et en pleine concorde ! L'esprit de l'entente cordiale se glisse au cœur de nos étreintes ! La parité de nos opinions, les analogies de nos conceptions, les duos de nos cris d'amour font l'égalité de notre tendre communauté. Nous sommes le fruit et le noyau !

 

Nous sommes en correspondance. Oui ! Nous nous correspondons comme nous correspondions autrefois ! Aujourd'hui, nous en gardons le souvenir postal ! Heureuse époque de notre amour balbutiant, que nous prenions au pied de la lettre ! Exaltantes relations épistolaires aux missives enflammées, espaces enluminés entre attentes et soupirs, repères topographiques pour notre carte du Tendre ! Parcours fléchés ! Oh ! Ma destinataire, à la fin de l'envoi, je touche, votre cœur !

Mais S.V.P. prière d'accuser réception, en télégramme ou S.M.S ! De nos jours, il faut communiquer utile et vite ! Hier, nous avions le temps de nous aimer et de l'écrire. Je bafouillais d'émois car, c'est en toute franchise, que l'amour, peu à peu, affranchissait nos échanges. Nos messages entre leurs feuillets se dépêchaient, sans faire un pli ! Nous nous pressions en désirs empressés, nous nous aimions en liaisons de pleins et déliés !

Nos correspondances régulières ont ainsi contribué à nous rendre fidèles, hier, aux postes et télégraphes et aujourd'hui aux posts ! Au règne de l'interdépendance, nous réseautons et papotons. Nous nous mêlons, nous nous en-mailons et nous en-maillotons, nous nous en G mêlons, tant et plus ! Nous nous mettons au point et nous synchronisons en 3, 4 ou 5G. Plus de querelles, tout se corrèle dans la concordance des temps d'aimer !

Nous avons expérimenté tous les modes de communication. Courriels, textos et fax imprimés ou petits billets doux aux lettres parfumées, aux reflets miroitants de nos promesses impatientes. Nouveaux Narcisses, nos écritures scintillent dans le miroir de nos deux cœurs ! Pourtant, nous évitons de nous noyer dans l'eau profonde de nos regards, embués d'émotion... Nous nous sommes donné le mot pour garder le cachet de l’authenticité ! Toujours, nous en faisons foi !

Nous nous aimons, gardiens de nos correspondances, en poste restante ! Nous ne sommes jamais en souffrance. L'amour tient nos promesses et nos cœurs, en attentes. Et nous nous gardons, mon ange, en liberté de mots et de messages ! C'est ici-bas, notre céleste destinée !

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Lettre à mon pote, échecs et maths 2/2

Publié le par modimodi

BAL CONF

En 5-7, entre le zéro et l'infini

Tu t'en souviens sûrement et tu le sais, toi, mon ami de classe, je n'étais pas doué pour les calculs et les maths.

Alors que les racines me mettaient la tête au carré, pourquoi les zélés professeurs, s'échinaient-ils tous, à vouloir m'extraire à mon ignorance et prendre ainsi le mors aux dents et le problème à la racine ?

Carrés dans leurs conceptions, ils avaient décidé, malgré les échecs, d'organiser mon cerveau, case après case, colonne après colonne, rangée après rangée, en abscisses et en ordonnées.

Dans la confusion des méthodes et des enseignements, j'ai perdu ainsi, bien des fois, patience et logique. Pourtant, nul abattement ou défiance ! En élève consciencieux et déterminé, quand les logarithmes imposent leur puissance et les algorithmes leurs étapes systématiquement programmées, je me mets en règle et je m'y soumets ! Résultat : il m'est impossible, du reste, de me soustraire à la moindre opération et de filer sans demander mon reste. Je fus ainsi de plus en plus déraciné et de moins en moins capable de déduction. Je n'y ai pas souvent trouvé mon compte.

Obstinément, sur le damier scolaire et selon la loi mosaïque, en développant de tous côtés leurs attaques, mes braves enseignants cherchaient à m'éviter les échecs et moi, bien sûr, à éviter les maths. Ils m'assénèrent, avec la preuve par 9, qu'avec du temps, je pourrais gagner du terrain et espérer une promotion, à condition de trouver la parade à mon obstruction ordinale : le coup de Maître !

Croyant naïvement et follement à l'opération du sain d'esprit, ils imagèrent leurs leçons de paraboles, censées me mettre le cœur aux quantiques. Devant mon attitude hiératique de Sphinx, ils tentèrent même à la base d'élever mon raisonnement monolithique à la pointe des pyramides. Quelle plaie ! Que de luttes pour rester à la surface, sans me casser le nez ni perdre la face !

Des mises au point excentriques parfois, diamétralement opposées souvent, devaient parvenir à élargir mon rayon d'action. Ainsi, on m'expliqua entre quatre-z-yeux, d'une mine désappointée, la quadrature du cercle "vicieux". Mais je me mettais sûrement le compas dans l’œil, car rien ne tournait rond et tout allait toujours de mal en pis... et pi, c'est pas mon rayon !

Bloqué des sinus, je ne parvenais jamais à prendre ni l'aire, ni la tangente. Considéré comme obtus, j'étais sans cesse dans leur angle de vue. Pour entrer dans leur jeu, à géométrie variable, je m'étais mis en 5, 7 et sans y regarder à 2 fois, à soutenir l'échange pour y faire bonne figure. Je faisais les 3 huit, penché sur d'énigmatiques problématiques, le plus souvent restant en plan sur des énoncés et des graphiques, des schémas et des figures, toujours tronquées.

Pendant ce temps, mes doctes et dogmatiques professeurs mettaient en équations, mes probabilités de progrès elliptiques et, en coupes, la spirale de mes échecs innombrables. Au total, un conglomérat de variations, de résidus et de dérivées et moi, toujours plus naufragé, noyé, à la dérive !

Et encore et toujours des fractures de moral et des fractions, sans réduction, ni simplification, toujours au même dénominateur de l'erreur en embuscade. Pauvre de moi ! J'étais contraint au régime d'entraînement, à la barre fixe de mes échecs, terme à terme. Eux seuls entraient en ligne de comptes.

Pourtant d'année en année, de l’école primaire, au collège puis au lycée et malgré leur acharnement et mes résolutions de progrès, il n'y eut, tout compte fait, pas de résultats co-efficients, entre eux et moi ! A la table de Pythagore, je n'ai jamais eu d'appétit !

Ah quelles époques ! J'étais toujours entre le zéro et l'infini. Mais devant l'infini, t'es si mal, si mal, que coup après coup, j'aurais dû au moins, me voir pousser la bosse des maths ou acquérir de l'esprit comme 4 !

Mon cher ami, au bout du compte, sans t'énumérer les étapes de mon parcours, post et péri scolaire, je suis simplement devenu, (tu en seras surpris), prévisionniste, calculateur dans le montage d'opérations. Avec le temps, j'escomptais sans doute guérir le mal par le mal mais hélas, la vie à mon instar, ne fait guère mieux que des comptes à rebours.

Bien mince est son résultat, puisqu’aujourd’hui encore, la politique du chiffre et les statistiques n'ont toujours pas ma préférence. J'ai mis sur le compte de la fatalité ces réticences automatiques. J'hésite même sur l'emploi de l'expression quand je t'affirme que tu fais partie du nombre de mes amis.

C'est dommageable mais ce l'était davantage, à l'époque de mes humanités gréco-latines ! En effet, malgré d'innombrables efforts, je restais sans prise, à découvert, sur le flanc, battant de l'aile. Oui dame ! Et à mon grand dam, le plus souvent damé sur le damier !

J'étais à la fois, un petit pion, coiffé du bonnet d'âne et une bête de sommes, envahie par les idées noires du tableau, qui marquaient à la craie d'interminables nuits blanches. Assommé de calculs cauchemardesques, je ne parvenais plus le jour, à me soustraire à l'attrait du somme, où les yeux grand ouverts, je faisais semblant de compter les moutons.

Je m'enfermais alors, sans retenue, dans ma tour d'ivoire, avec ma petite tête aux cases blanches et noires. Là, mes rêves souvent cavaliers empruntaient des chemins de traverse, diagonales d'un fou du roi qui mourait hélas, toujours dans l'arène scolaire.

Au réveil, j'avais tout sacrifié, déroqué de mon trône, j'étais le roi mort, dépouillé de toute illusion. Aux termes d'une partie nulle, sans faire ni une, ni deux, je me trouvais tout pat, couché, sans chiqué sur l'échiquier... Échecs et maths ! Échec et mat !

Compte sur moi ami, pour te garder mon estime et mon amitié !

 

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Lettre à mon pote, Echecs et maths 1/2

Publié le par modimodi

 BAL CONF

A la 6-4-2

Charles, mon cher ami, toi, qui es devenu commissaire aux comptes dans un grand cabinet d'audit, tu vas sourire à l'évocation de mes souvenirs scolaires.

Tu le sais, l'existence ressemble assez souvent à un vaste échiquier sur lequel évoluent tour à tour, les maîtresses de l'école de la vie avec leurs élèves et apprentis, tels des pièces postées, en garde de coups de maître !

Oh ! Il n'est pas facile de damer le pion, de prendre la reine, d'être adoubé le roi du jeu et de ne pas finir échec et mat ! Pour les enfants du roque, voici une vraie histoire de fous à la manœuvre ! Pour les esprits chevaleresques, voilà les cavaliers de l'apocalypse ! La Tour, prends garde !

Moi, l’école m'a plutôt réussi et ce qu'on appelle l'enfer de l'enseignement était pour moi, pavé de bonnes intentions. Nous avons toi et moi, usé nos fonds de culotte sur les mêmes bancs d'école de la république. Alors toi, tu le sais, pour la syntaxe, j'étais relax, pour la grammaire, élémentaire..., pour l’orthographe, pas en carafe, en rhétorique, un vrai lyrique, l'histoire, géo, pas Waterloo mais vl’a le hic, l'arithmétique, c'est et c'était ma vraie panique ! Je suis écliptique, apoplectique, cataleptique, à moi tout seul, le Titanic !

Même aux âmes bien nées, la valeur n'attend pas le nombre des damnés. Voué donc, aux furies numériques, (tu en as peut-être conservé quelques souvenirs moqueurs), j'allais être irrémédiablement précipité, dans l'abîme des calculs logarithmiques et matriciels, vectoriels et différents, ciel ! Le diable m'emporte, si j'en comprends le dixième. Au diable donc, les peines éternelles du nombre exact ! Mon compte est définitivement bon !

D'ailleurs, je le sus dès l'ouverture des festivités, comme 2 et 2 font 4, que ce serait fatidique et tragique. Qu'y pouvais-je, moi, le pauvre pion pathétique, engoncé dans mon tablier gris-noir, face à la grande dame, drapée dans sa blouse blanche ? Car, la reine des maths et maths-hics, était championne de la didactique, tic-tic. Après avoir enseigné les théorèmes à Pierre et à Paul, elle avait décidé de tout tenter pour me démontrer par A+B, les 36 façons de gravir 4 à 4, les degrés de la connaissance. C'était sans compter sur mes innombrables difficultés numériques et surnuméraires.

Sans pouvoir me retrancher, je m'étais donc mis en 4 pour monter en ligne mes opérations et tenter des variantes..."6 et 4 = 10, je pose zéro et je retiens... rien !" Hélas, vraiment rien, hormis quelques retenues, le soir, 13 à la douzaine, distribuées gracieusement par ma gentille maîtresse des colles !

J'avais beau multiplier les efforts et m'appliquer à déchiffrer ses intentions, je restais nul en sommes, accumulant les impairs, divisé sur une méthode à la 6-4-2 et des résultats toujours faux. Ne voulant pas sans cesse, payer l'addition, je passais une partie des cours sans demander mon reste, replié en défense.

Tout au long de ces infernales années, j'étais sur le gril, brûlant d'en finir avec ces supplices de calcul mental. J'avais beau me presser le fromage, j'avais des trous dans le gruyère où le problème est mental. Mens sana in corpore... Ça no ! Mais faut dire qu'à force de les collectionner, les z'héros sont fatigués.

Croyant à quelques mauvaises volontés de ma part, jugé comme un drôle de numéro, les essais multipliés de tous mes professeurs de tables arithmétiques, d'inconnues algébriques, de problèmes géométriques, de procédures cubiques et alchimiques se transes-formèrent en divisions.

Mais qu'y pouvais-je ? Comment, avec tous ces calculs qui me donnaient des coliques Freinet hic, ne pas se faire débile ? Pauvre de moi, pour qui les maths étaient de l'algèbre, les chiffres arabes de l'hébreu et qui perdais mon latin face aux nombres romains.

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Lettre d'excuses - Mea culpa !

Publié le par modimodi

BAL CONF

En retard

Tu le sais toi, mon semblable en humanité, notre belle vie se déroule dans l'affirmation de notre personnalité. C'est la somme de nos propos et de nos faits et gestes qui justifient notre présence au monde. Nous existons par la réalisation de nos actes et les intentions de nos bonnes paroles.

Les événements les plus divers rythment nos journées et structurent notre temps. Rituels, agendas, travail, relations, échanges, loisirs et repos, amour et amitié composent notre quotidien. Le bonheur est notre quête et notre lot promis à la tombola des jours de chance.

Il n'est nul besoin de légitimer nos modes de vie ni de nous défendre, il suffit d'être nous-mêmes. Mais devant l'adversité des situations les plus impromptues, il est parfois nécessaire d'expliquer, de s'excuser, d'argumenter pour se faire comprendre et pardonner. Il est obligatoire de toujours s'adapter, en fonction du contexte et de l'interlocuteur. Par oral ou par écrit, en public ou en face à face, par mail ou par lettre, il convient alors, de fournir des explications plausibles et crédibles.

Voici quelques exemples qui pourront t'aider, le cas échéant. Ils ont une constante : le motif du retard.

Tu es salarié, tu rentres de vacances. C'est ton premier jour et tu es en retard à ton travail. Quelle qu'en soit la vraie raison, tu peux t'excuser et invoquer le bouchon, dû à un accident sur la route ou sur l'autoroute. Tu peux évoquer l'incident sur la voie ou la ligne du train ou du métro, le débrayage surprise des agents, la panne de bus ou d'automobile...

Dans tous les cas, évite l'emphase et les excès mélodramatiques ! Ne va pas dire :

_ "Monsieur le chef de service, vous, qui avez du retard à l'allumage, vous comprendrez aisément ma panne de voiture... Pourtant elle sort du garage, je lui ai fait faire sa révision hier, dès notre retour du Portugal. Comme quoi chef, c'est comme les objectifs, il ne suffit pas de les réviser pour faire démarrer la reprise de l'activité !"

_ "Chef, mais comment avez-vous fait pour arriver à l'heure ? Vous n'avez pas été bloqué par l'accident ? Ah oui, c'est vrai ! Vous ne prenez pas la même route ! Mais non, j'suis bête ! Vous, vous bénéficiez d'un logement de fonction. Vous ne savez donc pas ce que c'est, la galère des embouteillages ! Vous le matin, vous n'êtes jamais gêné et vous pouvez même être, le premier arrivé. Enfin, comme disait Ulysse à Pénélope : mieux vaut tard que jamais ! Hé oui, Chef !  V'la enfin, votre meilleur élément ! Cachez votre joie !"

Dès la première semaine, évitez la rébellion et la revendication. Ne dites pas d'emblée :

_ "Monsieur le directeur, c'est à cause d'une politique ultralibérale comme celle pratiquée dans cette entreprise, que l'infortuné salarié, brutalement licencié, père désespéré de cinq enfants, s'est jeté ce matin, sur les voies, paralysant la ligne du RER B. Vous me permettrez de faire une collecte pour cette malheureuse victime du capitalisme sauvage."

Ne hurlez pas dans le mégaphone :

_ "Camarades, rejoignez-moi, à la porte de l'usine ! Les vacances continuent ! Cessez le travail ! Nos camarades syndiqués de la RATP nous montrent l'exemple. Soyons solidaires. Désormais y'a plus de retard, tant que le patron refusera de nous augmenter. Le seul attardé, c'est lui et ses méthodes !"

Ou encore, au retour des vacances, si tu es invité dans ta famille ou chez des amis et que tu as deux belles heures de retard ! Abstiens-toi, de toute diatribe, si c'est pour monologuer et dire au gré de tes différentes humeurs :

_ "Oh ! Vous êtes déjà tous là ! Pour la bouffe, comme disait grand-papa, y'a pas de fainéants ! Mais on dirait qu' j'arrive comme un cheveu sur la soupe à la grimace ! Ne vous gênez pas pour moi ! Ne levez pas la tête ! Continuez à vous goinfrer comme de pauvres affamés, à vous bourrer comme des saucissons ! J'peux bien vous comprendre, car moi aussi, je suis comme vous, à la bourre ! Pour mieux vous remplir, vous allez rire, j'ai même des excuses bidon !... D'ailleurs, ne vous mettez pas en retard pour moi !... Et puis, ne répondez pas tous en même temps, c'est pas poli de parler la bouche pleine !"

_ "Ah ! Vous ne m'avez-pas attendu ? Pourtant j'arrête pas de courir, depuis ce matin ! Je ne me suis pas arrêté, une seule seconde depuis qu'on est rentré hier... J'ai vidé mes valises et sorti les cadeaux. J'étais, pour vous les montrer, en train de sélectionner mes photos du festival des cerfs-volants quand le canari a fait une crise d'asthme ! J’ai dû le conduire chez le véto ! Ça m'a décalé toute ma journée. Sur la route, j'en ai profité pour déposer le linge au pressing. On ne peut pas toujours le laver en famille ! Et puis, j'dis ça, j'dis rien !... Bien sûr que vous serez d'accord avec moi !... Tout le monde n'est pas en grandes vacances, toute l'année et retraitée, comme mamie Paulette !... Ah ! Mais je vois, pour finir, je suis même en avance pour le dessert !"

_ "Continuez !  Ne vous dérangez pas pour moi ! J'n'avais pas très faim et puis, pas de regrets ! J'n'aime pas le poisson, surtout le rouget, y'a trop d'arêtes ! Et les épinards à la crème ! J't'en parle pas ! Ça me rappelle les repas de cantine !... Ah ! C'est vraiment une mauvaise journée ! Mon horoscope avait bien raison !... Au fait, Martine, je ne t'ai pas apporté de chocolats, ils risquaient de fondre par cette chaleur ! On va sûrement avoir une belle arrière-saison !"

_ "C'était bien pour aujourd'hui, l'invitation ? J'ai eu un doute ! Je m'suis dit, n'y va pas trop tôt, ça fait mort de faim !... Ah ! Y'a plus de poulet, Jeanine, c'est pas grave, je n'en suis pas privé. J'en avais déjà mangé ce midi et dimanche également, un Bresse aux morilles, chez ma mère ! Elle le fait divinement bien ! Et j'te parle pas non plus de cet été, en Espagne et de la paella géante, une tuerie ! Je me réserve pour la salade, c'est le plat de roi des escargots qui vont comme moi, toujours au plus vite ! T'en as fait, j'espère ?"

Après ces conseils, si tu gaffes encore, tu es inexcusable !

 

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